Mon bateau - Texte pour enfants, à illustrer

MON BATEAU

Mon bateau n’est pas un trois mâts que des pirates attaquent pour voler l’or des cales. Grimpé dans la mâture, je les vois arriver et préviens le bosco qu’il faudra manœuvrer. Branle-bas de combat ! Tout le monde sur le pont ! Larguez les cacatois et brassez bien carré ! Les canonniers et les boucaniers fourbissent leurs armes tant que la fuite n’est pas sûre. Par chance, le mauvais œil est sur lui et le voilà dans les calmes tandis que nous courrons sous le vent. Sauvés !

Mon bateau n’est pas un cargo qui promène des conteneurs tout autour de la mer. A la passerelle, j’explique au pilote du port qu’il doit au plus vite nous faire entrer pour décharger. Notre armateur n’est pas philanthrope : nous devons repartir vers Saint-Nazaire dans quelques heures ! Il saisit mon International English et vient à notre aide en envoyant à bord un pratique local. On ne s’échouera pas et on pourra livrer. Sauvés !

Mon bateau n’est pas un navire sablier grattant le fonds des mers pour ramener à terre de quoi faire des maisons. Sur le pont du navire je cours, je crie et je me coupe en quatre : la pompe encore en panne nous joue de mauvais tours. Nous les marchands de sable ne sommes pas là pour dormir. Quelques coups de clé, un peu de réflexion, de l’huile de coude et c’est la solution : nous voilà dépannés. Sauvés !

Mon bateau n’est pas un paquebot de luxe promenant au soleil des vacanciers oisifs. Pour qu’ils passent un séjour inoubliable, je suis à leur service. J’indique les horaires du cinéma, des cours de sport, des spectacles. Les plus distraits me demandent par où donc est leur chambre. Je virevolte en tout lieu dans cette ville flottante, toujours un sac en main pour qui serait malade. Sauvé !

Mon bateau n’est pas un voilier qui tout autour du monde court après ses copains. Des voiles en Kevlar, des mats en carbone, de l’électronique et du routage météo : j’ai tout mis pour gagner ma course de lenteur. On a vécu l’aventure en baladant sur l’eau les noms de nos sponsors, on s’est battu les amis. Les bateaux engagés sont bien tous arrivés. Le Comité de Course a dit : on va recommencer. Sauvés !

Mon bateau n’est pas un caseyeur capturant dans la baie les homards, les crabes, les araignées. Peut-être un chalutier : Allez, les gars, encore un trait pour remplir la gamelle. Alors on remet, ça, fatigués mais grisés, tout le corps rincé d’autant de mer, de vagues et de vent. Sous le pont on prépare les poissons, attendant que bientôt le patron vienne crier : « Route Terre ! ». Sauvés !

Mon bateau n’est pas un skiff sur lequel à l’envers je sue sang et eau à ramer comme un fou. L’entraîneur sur le bord crie dans son mégaphone. Je suis sur le bon rythme, en poussant j’y serai, je vais les enfumer, je vais tous les griller, j’appuie, je tire sur le bois, plus vite, plus fort, plus long. Trop long ? J’ai mal sur un côté. La ligne d’arrivée ? Sauvé !

Mon bateau ? Mon bateau m’a fait rêver. C’est un voilier de papier. C’est moi qui l’ai fabriqué. Regarde : je te montre comment j’ai fait.
(suit alors en dessin « pas à pas » la façon de faire un bateau en origami)
FIN


© FLOPIL